Accueil Actualités L’Assujetti Unique en matière de TVA
Transposition de l’article 11 de la directive n°2006/112/CE du Conseil de l’Union Européenne en date du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée1 , l’article 162 de la loi de finances n°2020-1721 pour 20212 a apporté une nouveauté au régime de la taxe sur la valeur ajoutée : l’assujetti unique.
Cette notion récemment introduite dans notre corpus juridique, et plus précisément à l’article 256 C du Code général des impôts (CGI) permet à chaque Etat membre de considérer comme un unique assujetti, plusieurs assujettis, étroitement liés entre eux sur les plans financier, économique et organisationnel.
Ces liens doivent exister au jour de l’option, et perdurer pour toute la durée de celle-ci.
L’article 256 C du CGI précise que pour être considérées liées sur le plan financier, les personnes assujetties doivent, savoir : « être contrôlées en droit, directement ou indirectement, par une même personne physique, y compris cette dernière ». Ledit article précise que cela recoupe les cas suivants :
– Un assujetti, ou une personne morale non assujettie, détient plus de 50% du capital social d’un autre assujetti (directement ou indirectement) ; – Un assujetti, ou une personne morale non assujettie, détient plus de 50% des droits de vote d’un autre assujetti ou d’une personne morale non assujettie ; Mais également, la loi répute l’existence du lien financier dans certains cas. Ces cas sont limitativement listés ainsi :
a) Les organes centraux, caisses et fédérations mentionnés aux articles L. 511-30, L. 512-55 et au b de l’article L. 512-1-1 du code monétaire et financier ainsi que leurs adhérents ou affiliés mentionnés aux articles L. 512-11, L. 512-20, L. 512-55, L. 512-60, L. 512-69 et L. 512-86 du même code ; b) Les membres des groupements prévus aux articles L. 931-2-1 et L. 931-2-2 du code de la sécurité sociale, à l’article L. 111-4-2 du code de la mutualité ainsi qu’aux articles L. 322-1-2 et L. 322-1-3 et au 5° de l’article L. 356-1 du code des assurances ; c) Les personnes qui respectent les conditions pour établir des comptes combinés en application de l’article L. 345-2 du code des assurances, de l’article L. 212-7 du code de la mutualité ou de l’article L. 931-34 du code de la sécurité sociale ; d) Les associations constituées conformément à l’accord du 25 avril 1996 portant dispositions communes à l’AGIRC et à l’ARRCO, chargées d’assurer la gouvernance d’un groupe paritaire de protection sociale dans les conditions prévues par l’accord du 8 juillet 2009 sur la gouvernance des groupes paritaires de protection sociale, et les associations et groupements d’intérêt économique contrôlés par ces associations sommitales, comptant parmi leurs membres soit au moins une fédération ou institution de retraite complémentaire régie par le titre II du livre IX du code de la sécurité sociale, soit au moins une association ou un groupement d’intérêt économique comptant parmi ses membres au moins une telle fédération ou institution ; e) Les sociétés de coordination mentionnées à l’article L. 423-1-2 du code de la construction et de l’habitation et les organismes qui détiennent leur capital. »
Pour être considérés comme liées sur le plan économique, les personnes assujetties doivent exercer (i) une activité principale de même nature, (ii) ou des activités interdépendantes, complémentaires ou poursuivant un objectif économique commun, (iii) ou une activité réalisée en totalité ou en partie au bénéfice des autres membres de l’assujetti unique. Etant précisé que le législateur n’a pas restreint les domaines d’activités pouvant faire l’objet d’un assujetti unique. En revanche, l’ensemble de ses membres doivent avoir leur siège, ou un établissement stable, ou à défaut leur domicile ou résidence habituelle en France3 .
Le lien organisationnel résulte quant à lui (i) de la direction commune, directement ou indirectement, en fait ou en droit, (ii) ou de la concertation totale ou partielle dans leurs activités respectives.
Chaque assujetti ne peut être membre que d’un seul assujetti unique, et un assujetti unique ne peut pas être membre d’un autre assujetti unique. Une personne non assujettie ne peut intégrer un assujetti unique4 . Chaque assujetti unique désigne parmi ses membres un représentant, sur qui reposera la charge des obligations déclaratives, et autres formalités. L’attribution du statut de représentant n’est pas figé ; les membres peuvent décider d’en changer5 . Le représentant acquittera en son nom la taxe à la valeur ajoutée, et obtiendra directement tout crédit de taxe. Aux yeux de l’administration fiscale, toute livraison de bien ou prestation de service effectuée par un membre de l’assujetti unique est réputée réalisée par l’assujetti unique6 . Les membres de l’assujetti unique sont solidaires du paiement de la taxe, et de ses accessoires (intérêts de retard, majorations et amendes), mais à hauteur des droits et pénalités dont il serait redevable s’il n’était pas membre. La création de l’assujetti unique emporte disparition de la personne en tant qu’assujetti au sens de l’article 256 A du CGI. L’article 256 C du CGI nous précise que chaque membre est par la suite considéré comme un secteur d’activité. Etant précisé que la création de l’assujetti unique ne vaut que pour l’application des dispositions relatives à la taxe sur la valeur ajoutée. Elle n’a aucune incidence sur les autres impôts, taxes, droits et prélèvements. Par ailleurs, l’entrée ou la sortie d’un assujetti en tant que membre constitue un transfert d’universalité totale. Cela signifie que les dispositions de l’article 257 bis du CGI7 lui sont applicables.
Aux termes dudit article 256 C du CGI, la constitution d’un assujetti unique n’est qu’optionnelle. Celle-ci doit faire l’objet d’une demande exprès auprès du service des impôts compétent. Chaque membre doit y consentir. Doivent être déposés à l’appui de l’option8 :
– Le formulaire F CM de création ; – L’accord conclu entre les membres pour constituer l’assujetti unique, signés par tous ; – La télédéclaration du périmètre de l’assujetti unique.
A ce sujet, l’administration fiscale n’a pas fixé de forme spéciale audit accord. L’option doit être transmise au plus tard le 31 octobre de l’année qui précède son application. Les premières options ont donc eu lieu courant de l’année 2022, pour une application en 2023. L’option prend effet au 1er janvier de l’année qui suit l’option, pour une durée de 3 ans. Cette première période de 3 ans est incompressible.
Le 3. du III.- de l’article 256 C du CGI dispose que l’assujetti unique cesse de plein droit, savoir :
– A la date à laquelle l’un des liens financier, économique et organisationnel disparait ; – A la sortie de l’avant dernier membre.
L’administration fiscale est également venue préciser9 qu’il peut être volontairement mis fin à l’assujetti unique par dénonciation de l’option. La cessation de plein droit peut intervenir à tout moment, tandis que la cessation volontaire ne peut intervenir pendant la période de trois ans incompressible. La cessation, en tout état de cause, doit faire l’objet d’une déclaration au service des impôts compétent. Etant précisé qu’à l’issue de la période de trois années civiles qui suit l’option, tout membre peut demander à sortir de l’assujetti unique. Mais cette sortie doit faire l’objet d’un accord du représentant, et doit être déclarée au service des impôts compétent. Cela signifie a contrario que par principe, la composition de l’assujetti unique est figée les trois premières années. En revanche, tout membre qui ne remplit plus les conditions de liens cesse de faire partie de l’assujetti unique. Cette cessation a lieu de plein droit à compter du premier jour du mois qui suit la disparition des liens.
PRECISIONS RELATIVES AUX ACTES En pratique, les actes notariés relatifs à tout membre de l’assujetti unique devront préciser :
• L’adhésion à l’assujetti unique ; • Le numéro d’identification à la TVA et l’adresse de l’assujetti unique ; • Le numéro d’identification à la TVA et l’adresse du membre concerné ; • Les coordonnées du représentant ; • Le centre des finances publiques dont dépend l’assujetti unique.
Par ailleurs, les actes réalisés entre membres de l’assujetti unique ne donnent pas lieu à la perception de la taxe sur la valeur ajoutée10.